Capitaine Marcel Robichon du maquis Vauquois/Alsace – Combattant des trois guerres

Né en août 1894, Marcel ROBICHON passe sa jeunesse à ADRIERS dans le Sud-Vienne où, après quelques années en internat à Poitiers, il revient travailler avec ses parents dans la ferme et l’exploitation forestière. Enfant espiègle, adolescent appréciant la vie et la liberté, il se forge une idée de l’existence dans le travail mais aussi avec les distractions offertes aux jeunes en ce début de siècle.

Marcel ROBICHON (Capitaine VAUQUOIS)

Au mois d’août 1914, il atteint ses vingt ans mais il est lui atteint par cette guerre qui vient d’être déclarée. Mobilisé début septembre, après les « classes », il rejoindra le front en janvier 1915 avec le 89ème régiment d’infanterie et connaîtra le « feu » à Vauquois en Argonne, sur cette butte qui ne cesse d’être prise et reprise pendant toute une partie du conflit. Lui qui n’avait jamais vu de morts participe pendant 17 mois à ces attaques et défenses, où les soldats des deux côtés, sur ce lieu appelé « butte rouge », tombaient comme des mouches. Suivant les combats dans la Somme, l’Aisne et l’Alsace, il est libéré le 13 septembre 1919 avec le grade de sous-lieutenant après être passé par tous les niveaux inférieurs au cours de ces années de bataille dans les corps d’élite de grenadiers et de corps-francs de son régiment. Ces galons furent acquis par son courage, son exemple et ses aptitudes au commandement reconnus par ses chefs et l’attribution de cinq citations et la légion d’honneur épinglée à 24 ans. Pour ceux qui l’ont connu, la valeur de l’homme était assortie d’une clairvoyance et d’une droiture exceptionnelles malgré son dégoût prononcé pour les guerres.
Revenu à la vie civile, il lui restait à panser les plaies, aider les victimes et défendre les droits pour les veuves et les orphelins ainsi que lutter pour son idéal : la PAIX et une vie meilleure pour tous. C’est avec ces objectifs qu’il s’engage dans la municipalité de sa commune et les associations humanitaires et patriotiques.
Pourtant ce n’est pas fini et ses espoirs seront déçus avec cette nouvelle guerre qui arrive le 3 septembre 1939. Il est mobilisé et part en tant que lieutenant au 41ème régiment des tirailleurs Algériens. Après un séjour au camp de LA COURTINE, il rejoint le front d’Alsace où il passera cet hiver calme de la drôle de guerre qu’il apprécie mal et la terminera sans avoir combattu près de St DIE comme prisonnier de guerre malgré sa rage et son profond désir de liberté. Dirigé vers l’Oflag XVII en MORAVIE, ses tentatives d’évasion échouent mais il sera néanmoins libéré en tant qu’ancien combattant de 1914/18 en août 1941. Revenu au pays, sa surprise est grande devant les conditions de vie de l’occupation : liberté restreinte, « ordre nouveau », restrictions dans les approvisionnements alimentaires et autres, donc rien d’acceptable pour ce patriote actif et combatif. Alors il ne pouvait que participer courageusement à cette révolte qui commençait à gronder un peu partout : amorce de la Résistance intérieure. Ce fut d’abord des petites actions pour démoraliser l’occupant, des altercations avec des collaborateurs et une police soumise à la Gestapo et ensuite l’accueil dans sa ferme de jeunes et de poursuivis pour les aider et aussi envisager les actions d’avenir avec une résistance armée. Obtenant des contacts avec les organisations de résistance clandestine : F.T.P., Armée secrète, c’est avec eux qu’aura lieu le premier parachutage d’armes et de munitions le 5 mars 1944. Cet approvisionnement sera l’amorce et l’homologation de son groupe en formation à la ferme de St JEAN de PERSAC par VAUQUOIS qui donnera ce nom à ce groupe en souvenir de ses combats de 1914/18. Continuant l’organisation de la résistance dans le secteur, les actions en vue de la Libération vont s’enchaîner :
– parachutages d’armes et de munitions avec les autres groupes dont le premier, le 5 mars 1944,
– sabotages divers : botteleuse de paille et foin, moulins de Vilars, pont de chemin de fer, etc.…
– contacts avec le groupe Anglais TONKIN dans le bois de Verrières,
– aide aux aviateurs Anglais tombés à Persac et transport,
– accrochages et attaques des groupes Allemands en remontée vers le front jusqu’à la libération du secteur : Persac, Fleuré, Gençay, Croutelle, ferme du Breuil et Poitiers,
– fonctions à l’État-major de Vienne-Sud (secteur D).
Après la Libération de la Vienne, le capitaine ROBICHON continue son engagement sur le front de l’Atlantique à Saintes, Royan, La Tremblade et La Rochelle où il fut libéré pour la 3ème fois de la vie militaire et ensuite démobilisé à Bordeaux le 4 janvier 1946. Capitaine honoraire, ce combattant grand patriote avait donné onze années de sa vie à la France, toujours dans le danger mais en mettant au plus haut le sens du devoir et la passion de la liberté.
Revenu à la vie civile dans sa commune de Adriers, il continua à s’y investir pour ses compatriotes jusqu’à sa fin de vie en 1959 à 65 ans.

QUEL BEL EXEMPLE DONNE A NOUS TOUS CAPITAINE ROBICHON (VAUQUOIS)

Pour terminer cette synthèse d’une vie si bien remplie, je rappellerai simplement ces quelques vers du poème de sa fille Jacqueline dédié à son cher papa :

« Nous voulions simplement ne plus vivre à genoux
Le poète l’a dit et c’est vrai, c’est debout que nous voulions lutter
Que nous voulions lutter en donnant l’espérance
Beaucoup se sont levés pour faire la RESISTANCE.

Parce que nous nous cachions au plus profond des bois
Certains nous appelaient : bandits ou hors-la-loi
Collabos, miliciens recherchaient à outrance
Les Maquisards, les partisans, ceux de la RESISTANCE.

Elle fut faite à la fois de larmes et puis de sang
Elle fut faite de bravoure, de tant de sentiments
Elle fut faite de colère, jamais d’indifférence,
Elle fut faite d’enthousiasme, elle fut bien RESISTANCE.

Elle fut faite d’amour, de générosité
Je crois que tout est là pour immortaliser
A la fois l’épopée, l’élan, l’espérance
Contenu dans ce mot, ce seul mot : RESISTANCE. »

Sources :
– Historique des Unités combattantes de la Résistance du Ministère de la Défense (Direction de la Mémoire)
– Documentation et archives de Mme J. RIFFAUD, fille ROBICHON

Texte de J. RIGAUD réalisé avec la documentation de Mme J. RIFFAUD