Marie-Louise Troubat – résistante de Poitiers – déportée à Ravensbrück

Le domicile de Marie-Louise TROUBAT, une épicerie-café, situé à Buxerolles, fut dès 1940 le lieu de rendez-vous et la plaque tournante d’un groupe actif de résistants communistes à Poitiers. Planques, caches d’armes et de munitions,réunions clandestines, plan d’évasion réussie, organisation de sabotages ont été décidés et mis au point Chez Marie-Louise.

Marie-Louise Troubat

Marie – Louise TROUBAT est née le 18 janvier 1893 à Lussac les Châteaux.

Marie – Louise tenait une épicerie – café, 4 route de Lessart à Buxerolles. Il faut noter que la situation de son bistrot était en retrait par rapport au village de 1000 habitants, bien situé pour le passage des vélos sur la passerelle piétonne ou par le pont de Rochereuil. Les ouvriers et les petits fonctionnaires revenant de Poitiers et allant vers Lessart ou Chasseneuil et Dissay s’arrêtaient pour se ravitailler en produits alimentaires et boire un coup. Les cheminots étaient nombreux autour de la Porte de Paris.
Le rendez- vous des militants communistes était avant la guerre chez Marie-Louise. Au moment de la déclaration de guerre, avec la mobilisation, les hommes furent envoyés sur le front. Quelques uns connurent tout de suite un camp à l’arrière, le gouvernement se méfiant du Pacte germano-soviétique (militants communistes) et des pacifistes. D’après Alphonse Bouloux, les renseignements généraux prirent le fichier du trésorier du P.C., en laissant l’argent à la permanence de la rue de Maillochon. Ce fichier servira plus tard pour la surveillance des communistes responsables des rayons et des cellules.
Après la défaite, les copains se retrouvèrent autour d’un verre chez Marie-Louise, en dehors du quartier des affaires : gare, abattoir, garages…
Les liens entre les militants clandestins poitevins continuaient d’exister : Tournat de Montamisé ; Jarry de Beaulieu ; Quintard Pierre d’abord rue du Planty à Buxerolles puis rue Frémont (il n’avait pas changé de quartier) ; Bastiani et sa femme ; Bardon Eugène et Hippeau J. rue des Quatre Roues ; Béjeau L. parent de Valette Hélène à Buxerolles ; Brin L. de Saint Georges ; Coll J. de Poitiers ; Demello J. de Dissay ; Penault L. de Saint Benoît ; Rousseau A. rue de Maillochon, qui fait la liaison avec Châtellerault (Marit Fernand vient les voir et se déleste des tracts chez Marie-Louise).
Plusieurs communistes poitevins arrêtés le 23 juin 1941 connaissaient bien l’endroit : AMAND René, BOISSON Emile, COURADEAU Marcel, MENIENS Alfred, SAILLER Léopold.
Avec son fils d’un premier lit, Clotaire Maupin, arrivé pendant l’été 1940, l’activité directe va commencer. Si Marie – Louise fut une véritable grand-mère pour Pierrot Quintard, Clotaire fut le grand frère, qu’il suivit dans la préparation et l’exécution des sabotages.
Les armes récupérées par Pierrot dès juin 1940 furent nettoyées et graissées chez Marie – Louise et cachées dans une barrique défoncée puis « refoncée » dans sa cave. Les manipulations sous le hangar surélevé ne se voyaient pas de la route de Lessart.
La maison fut une véritable plaque tournante pour les communistes dans l’action :
– Dépôts de tracts fabriqués à Châtellerault.
– Stockage et camouflage de munitions et armes qui ne furent jamais découvertes.
– Départ des actions sur la route de Lessart (pylônes et rails) avec Bardon.
– Réunions jusqu’à l’arrestation de Clotaire Maupin le 20 décembre 1941.
– Les réunions du Parti Communiste clandestin se firent ensuite près du cimetière de Chilvert.
– Marie – Louise fut avec Pierrot Quintard la cheville ouvrière de l’évasion de Durosier de la prison de la Pierre Levée. Durosier avait une planque relais chez Marie-Louise.
– Le plan de Durosier fut envoyé à Marie-Louise, au crayon sur un papier quadrillé, grâce à un gardien. Marie-Louise mit un bocal de pâté et des boules de pain dans un slip à Clotaire, et Pierrot et Penault les portèrent à la prison. Durosier scia les barreaux avec les lames de scie cachées dans les boules, s’échappa et alla se cacher chez Jarry où Pierrot est allé le voir. Il rejoignit ensuite Dissay par ses propres moyens.
Ce fut la seule évasion réussie de la prison de la Pierre Levée pendant l’occupation.

Mais l’évasion de la prison et l’attentat contre le docteur Guérin furent suivis d’une surveillance par la SAP (Section des Affaires Politiques). Début août, Pierrot, conscient du danger, part dans le Gers poursuivre son combat de résistant, mais ne peut entraîner les frères Delaunay qui sont arrêtés plus tard, accusés d’être les auteurs avec Rieckert du déraillement d’un train à Ligugé. Les trois jeunes résistants seront condamnés à mort et fusillés au Mont-Valérien.
Tournat de Montamisé et Marie-Louise Troubat sont arrêtés le 4 août 1943, les planques étant découvertes.
Pierre Tournat est déporté le 19 janvier 1944 à Buchenwald.
Marie-Louise Troubat est déportée le 28 janvier 1944 à Ravensbrück.

Ils sont revenus tous les deux de l’enfer des camps de concentration.

Un foyer logement à Poitiers porte le nom de Marie-Louise Troubat, femme d’honneur et résistante de la première heure.

Texte élaboré par Jean Amand, d’après les notes de Roger PICARD – historien.