La ligne de démarcation

A Rethondes le 22 juin 1940, la France se voit imposer une frontière intérieure…

La ligne de démarcation

La ligne de démarcation

Avant d’occuper la France, les Allemands l’avaient parfaitement cartographiée avec ses gendarmeries, ses boulangeries industrielles, ses usines sidérurgiques. Aussi lorsque Hitler confie au général Jodl la mission de découper la France en fonction des objectifs militaires, ce dernier peut-il plus facilement inclure, avec ses spécialistes des frontières, les exigences économiques et administratives.

A Rethondes le 22 juin 1940, la France se voit imposer une frontière intérieure traversant 13 départements. La demarkationslinie, la ligne de démarcation, divise le pays en deux zones principales. La zone non occupée où s’installe le régime de Vichy dépendant du maréchal Pétain et la zone occupée, sous les ordres du commandement militaire allemand en France, militärbefehlshaber in frankreich.
Les trois quarts de la France sont donc sous commandement allemand, avec la totalité du littoral atlantique, permettant ainsi la défense d’un éventuel débarquement venu de l’ouest. Mais aussi un couloir d’accès vers l’Espagne franquiste dans la perspective d’un ralliement de Franco à la guerre menée par Hitler.
Les militaires allemands gardent la ligne de démarcation jusqu’en février 1941, date à laquelle les douaniers allemands les remplacent. Il reste un quart du pays non occupé que Vichy tente de gérer sous la férule allemande. Un officier allemand présent à Rethondes évoque « un mors dans la bouche du cheval » ce qui conduit à une collaboration plus étroite entre Vichy et le régime nazi.

Peu à peu des postes français avec guérites et barrières rudimentaires font face aux postes allemands mieux équipés, parfois jalonnés de mines et disposant de herses, et de barrières mobiles. Cependant, cette ligne, bien trop étendue, ne peut être hermétique pour interdire complètement la circulation interzone. Aussi, dans la Vienne nombre de personnes seules ou aidées de passeurs réussissent malgré le danger à franchir la ligne. Les Allemands tentent de restreindre les libertés. Les ausweiss laissez-passer obligatoires deviennent plus difficiles à obtenir. Seuls les « frontaliers » qui habitent dans un espace de 10 km de part et d’autre de la ligne peuvent avoir des laissez–passer spéciaux pour aller travailler d’une zone à l’autre. C’est le cas des agriculteurs entre autres qui ont vu leurs terres amputées. L’ordonnance allemande du 18 juillet 1940 rappelle que tout fluchthelfer, passeur, tenté par le passage clandestin d’informations et de courrier sera puni de travaux forcés ou de prison. Le paragraphe 5 de cette loi stipule : « Dans les cas particulièrement graves, un arrêt de mort pourra être prononcé. »

La ligne de démarcation ne disparait sur le terrain que le 1er mars 1943 plusieurs mois après l’occupation totale de la France, le 11 novembre 1942.

Sources : Eric Alary. CCHA Centre Châtelleraudais Histoire Archives. Eric Alary revue d’histoire du pays châtelleraudais N°13,2007 p 5-23. Du même auteur, La ligne de démarcation édition Perrin Paris 2003,129 p.Eric Alary est l’historien de référence sur cette question objet de sa thèse.

Rédigé par Louis-Charle MORILLON