Recherche de témoignages

Le petit-fils de Valentine et Ernest Martin, Bernard Martin, recherche des renseignements sur le séjour de Félix et Madeleine Czernabroda, persécutés du nazisme, dans la ferme de ses grands-parents. Vous trouverez ci-dessous son témoignage. Si vous pouvez le compléter, nous vous remercions de nous contacter (formulaire accessible en bas de page -contact).

Ernest Martin vers 1938

Bernard Martin, de Normandie, nous a contacté. Il a retrouvé des membres de la famille Israélite que ses grands-parents ont cachés en 1943 et 1944 dans la Vienne.

« Voici en quelques lignes l’histoire de la rencontre de ces deux familles telle que j’ai pu la reconstituer après avoir recueilli le témoignage de mon père, Roger Martin, de mon oncle Louis Martin, des descendants de la famille Czernabroda ainsi que quelques uns des habitants de Saulge.
La famille CZERNABRODA, famille Israélite, vivant en région parisienne jusqu’en 1942, est composée de 6 personnes : Le père : FELIX qui possède un atelier de tailleur, sa femme, ESTHER, une fille MADELEINE, et 3 fils JACQUES, ALBERT et MICHEL.
Les rafles contre les juifs devenant de plus en plus pressantes, la famille décide de se réfugier en zone non occupée.
Les Czernabroda franchissent clandestinement la ligne de démarcation dans la Vienne, dans le secteur de Chasseneuil-du-Poitou dans les faubourgs de Poitiers. Ce franchissement, n’est pas sans danger, puisque la maman se fait capturer à cette occasion, et sera internée à Poitiers puis en région parisienne et enfin déportée à Auschwitz d’où elle ne reviendra pas.
Après plusieurs pérégrinations dans le département pendant l’année 1942 et le début 1943, Madeleine qui se fait appeler MARIE-LOUISE DUPARC, trouve un emploi sous cette identité chez Guilloneau, tailleur à Montmorillon.
Elle aura aussi comme fonction d’être gouvernante et professeur de piano des enfants Guilloneau !
Albert, lui se fait embaucher comme journalier sur la ferme de Marsat (commune de Lathus), où le secrétaire de mairie Monsieur Nallet lui fournit de faux papiers il se prendra d’amitié avec le fils de ce dernier : François Nallet.
Afin d’échapper à un contrôle des gendarmes, Madeleine, s’enfuit de Montmorillon et sillonne la campagne environnante en bicyclette, et trouve refuge à la ferme du Thoureau chez mes grands parents ou son père, Félix la rejoindra.

Quand Madeleine et Félix Czernabroda, arrivent à la ferme du Thoureau, celle ci est exploitée par Valentine et Ernest Martin, mes grands parents.
En 1943 Valentine à 49 ans et Ernest en a 51. Ils sont métayers, et le seront toute leur vie.

Ils ont 5 enfants, 5 garçons : Louis l’aîné 22ans , Roger (mon père) 20 ans, Robert 19ans, Camille 18 ans et Maurice 15 ans. (Robert, Camille et Maurice, nous ont malheureusement quittés.)
La ferme du Thoureau se trouve sur la commune de Saulge (Vienne) et se situait au début de l’occupation, à peu prés à 30kms de la ligne de démarcation et donc en zone non occupée. Dans cette commune une petite minorité de personnes sympathisait avec l’ordre nouveau du gouvernement de la collaboration de Vichy.

Pendant le passage de Madeleine et Félix au Thoureau, Louis et Roger, effectueront leur période de chantiers de la jeunesse, l’équivalent du service militaire que Vichy imposait aux jeunes gens de la zone non occupée.

Photo de Louis au Thoureau en uniforme des chantiers de la jeunesse.

Il est à noter que le maquis puisera largement, dans les effectifs des chantiers de la jeunesse pour grossir ses rangs, c’est d’ailleurs ainsi que mon père et mon oncle ont été enrôlés dans le maquis au sein du « Groupe Robert ».
Dés l’arrivée de Madeleine et Félix, et afin de libérer une chambre, Ernest enverra Roger loger dans la ferme voisine de la Claudaline.

Quelle a été la vie de Madeleine et Félix au Thoureau ?
Félix est devenu ouvrier agricole, employé en particulier, à surveiller le bétail et les moutons dans des pâtures, qui à l’époque n’étaient pas clôturées, quand à Madeleine, elle aidait ma grand mère aux tâches domestiques qui étaient le lot des jeunes filles de la campagne de l’époque.
Cependant, mon père et mon oncle se souviennent fort bien que Félix, en plus de ses fonctions de vacher, leur à fait don de costumes et de pantalons de golf, qu’il avait confectionné dans des couvertures de laine (il était tailleur).
Un épisode inconnu jusque là par notre famille, (ma Grand’mère n’en a jamais parlé à personne) m’a été raconté par la fille et le mari de Madeleine (Elisabeth Birene et Maurice Grosman), Madeleine étant malheureusement décédée au début des années 2000.
Un jour, 2 gendarmes, sont venus chercher la petite juive au Thoureau, et ma Grand’mère aurait saisit une hache pour les menacer, il semble que la dissuasion ait été suffisante, puisque les gendarmes ont tourné les talons et ne se sont jamais représentés !

La libération arrivera et les quatre Czernabroda qui avaient trouvé refuge dans le département de la Vienne seront saufs. »

Cette famille a honoré la mémoire de Valentine et Ernest Martin auprès du Centre Simon Wiesenthal-France (CSW) et en faisant planter des arbres en Israël par le Keren Kaymeth Lélsraël (KKL : Fond National Juif).